Archives du mot-clé dysphasie

L’accès aux ressources numériques pour faciliter le travail des élèves

Le matériel que j’utilise habituellement pour introduire les notions de géométrie liées aux angles et aux lignes remarquables est constitué de beaucoup de connaissances déclaratives qui étaient présentées de façon condensée et entrecoupée d’exercices provenant de diverses sources. Pour les élèves dyslexiques et dysphasiques éprouvant des difficultés en lecture, la consultation de ces notes de cours constituait un défi de taille qui les éloignait de l’essentiel. La présentation des notions, à partir de tableaux récapitulatifs difficiles à consulter, ne suivait pas nécessairement d’ordre précis. De plus, l’annotation de ces notes à l’aide d’un surligneur était peu efficace pour mes élèves dyspraxiques et les exercices n’étaient pas suffisamment aérés pour qu’ils puissent inscrire leurs réponses.

Bien sûr, tous ces problèmes auraient pu être réglés si j’avais pris la peine de retaper dans un logiciel de traitement de texte tous les exercices que j’avais simplement numérisés à partir de divers documents. Comme cette façon de faire représente beaucoup de travail et nécessite un temps que je n’ai pas, j’ai plutôt opté pour l’utilisation de l’application prizmo qui permet de numériser rapidement les documents à partir de photos. Il est ensuite possible de sélectionner les portions de texte que l’on souhaite rendre accessible pour les élèves afin qu’ils puissent se les faire lire à voix haute. En utilisant prizmo, j’ai donc numérisé les sections désirées en les réorganisant : j’ai fait des sections plus courtes, plus aérées et je les ai regroupées plus logiquement afin de tenir compte des besoins de mes élèves. J’ai pu procéder de la même façon pour les exercices ciblés.

Voici un exemple de notes de cours numérisées :

Exemple notes de cours

Pour faciliter l’organisation des élèves, j’utilisais un dropbox commun dans lequel il y avait un dossier pour les notes de cours ainsi qu’un dossier pour les exercices. Je devais rendre disponible les notes de cours en format prizmo ET en format pdf. Le premier permettait à l’élève d’ouvrir les notes dans prizmo et de se les faire lire à voix haute autant de fois qu’il en avait besoin (les élèves utilisent des écouteurs pour cette étape). Le second permettait aux élèves d’ouvrir leurs notes de cours dans l’application pdf master. Cette application permet d’annoter, de surligner, d’encadrer et même d’écrire sur le pdf. Les élèves pouvaient donc utiliser cette application pour annoter leurs notes de cours, mais aussi pour compléter les exercices. Le fait d’avoir toutes les applications sur le ipad, permet de passer de l’une à l’autre de manière très efficace et sans perte de temps. Les élèves deviennent aussi rapidement autonomes. Ils peuvent faire des allers-retours entre leurs notes (en les réécoutant au besoin) et leurs exercices. En cas de doute, ils pouvaient même aller valider leurs réponses en utilisant l’application geometry pad.

Voici un exemple de notes de cours annotées par un élève :

Annotation notes de cours

Voici un exemple d’exercice complété par un élève :

2014-03-18 16.46.09

Une fois les exercices terminés, les élèves transfèrent leurs exercices dans le dropbox dans un dossier à cet effet. Ainsi, à la fin de la journée, je n’ai qu’à ouvrir ce dossier pour corriger leur travaux sur le support numérique. Il est ensuite facile pour moi de leur renvoyer dans leur dossier personnel de travaux corrigés.

Voici un exemple d’exercice corrigé :

2014-03-18 16.52.08

Les élèves, qui normalement se perdent dans leurs notes de cours et qui font toujours appel à moi, réussissent maintenant à mobiliser leurs ressources de manière autonome en y faisant appel en continu pendant leur travail. Les élèves sont donc plus engagés cognitivement dans la tâche et ils persistent afin de la terminer. Avec cette façon de fonctionner, nous avons eu recours à plusieurs fonctions d’aide qui ont permis la compensation de plusieurs problématiques associées à la dyslexie, à la dysphasie et à la dyspraxie : la synthèse vocale (décodage), le soutien à l’annotation (mobiliser ses ressources), l’organisation des ressources (mobiliser ses ressources) et la représentation (analyse et interprétation à l’aide de geometry pad).

Le plan cartésien au service de la géométrie

Pour introduire les notions de géométrie de secondaire 1 (lignes et angles particuliers, périmètre et aire) aux mêmes élèves qui avaient participé à mon projet sur les statistiques (élèves dysphasiques, dyspraxiques et dyslexiques), j’avais besoin qu’ils apprennent à utiliser l’application « Geometry Pad ». Cette application permet de créer des lignes, des angles, des formes, etc. Elle leur permet aussi de les manipuler et de facilement lire les mesures. Cependant, elle nécessite l’utilisation du plan cartésien. Comme je n’avais pas encore abordé cette matière avec mes élèves, j’ai choisi d’utiliser une situation d’apprentissage d’évaluation (SAÉ) intitulée « Trouver son chemin à travers les montagnes ».

À travers cette situation et en utilisant « Geometry Pad », mes élèves ont travaillé les nombres entiers, la priorité des opérations, la différence entre une droite et un segment ainsi que toutes les notions en lien avec le plan cartésien. Certaines de ces notions n’auraient pas été sollicitées si nous n’avions travaillé qu’avec du papier. Par exemple, lorsque les élèves devaient relier deux points dans le plan, ils avaient le réflexe de tracer une droite. Par contre, en faisant ce choix, ils remarquaient que la droite dépassait les deux points et se poursuivait à l’infini. Face à ce problème, les élèves se sont questionnés. Ils ont dû explorer d’autres options pour finalement se rendre compte qu’ils devaient choisir de tracer un segment et non une droite. Cette application a donc permis aux élèves de découvrir les caractéristiques différenciant un segment d’une droite même si ce n’était pas nécessairement l’objet à l’étude.

L’application a grandement facilité les apprentissages de mes élèves, car ils avaient droit à l’erreur. En appuyant longtemps sur le point, ils pouvaient lire les coordonnées et déplacer le point au besoin en observant les changements de coordonnées. Mes élèves étaient beaucoup plus persévérants qu’à l’habitude face à un nouvel apprentissage, car ils pouvaient facilement se reprendre. Rapidement, ils ont maîtrisé par eux-mêmes des fonctions leur permettant d’identifier les différents tracés sur le plan.

J’ai testé leurs connaissances en faisant des exercices papiers avant et après l’utilisation du ipad et plusieurs erreurs ont été réglées suite à la manipulation dans « Geometry Pad », et ce, sans que je fasse un enseignement supplémentaire.

Pour terminer, j’aimerais souligner que l’utilisation de cette application a permis de soutenir trois gestes cognitifs chez mes élèves : 1) planifier son action (ex. verbaliser ce qu’il a fait et ce qui lui reste à faire), 2) réfléchir à son action (ex. identifier ses erreurs, se valider, s’adapter face aux difficultés, tenir compte de ses erreurs pour s’ajuster, évaluer l’efficacité de sa démarche, etc.) et 3) communiquer sa pensée (ex. laisser des traces de sa démarche, expliquer son raisonnement, etc.).

Projet statistiques : un sondage pour le journal étudiant

Pour enseigner les statistiques de secondaire 1 à mon groupe de quatre élèves (FPT), j’ai planifié un projet en collaboration avec le journal étudiant. Un élève écrivant des articles pour le journal étudiant a « engagé » mes élèves comme statisticiens afin de faire passer un sondage aux élèves et aux différents intervenants de l’école. Une fois le sondage complété, mes élèves devaient interpréter les résultats et remettre leurs conclusions au rédacteur du journal pour qu’il puisse écrire son article et le publier dans le journal étudiant.

Les élèves de ce groupe présentent une ou plusieurs des difficultés suivantes : dysphasie, dyslexie, dyspraxie et dysorthographie et trois d’entre eux utilisaient déjà un portable en classe avec des synthèses vocales et l’aide à la lecture. Avec cet outil, nous avions déjà pris des notes sur les notions statistiques.

Le ipad a été utilisé pour la création du sondage, la passation de celui-ci et la compilation des résultats. Pour créer le sondage, j’ai utilisé Google Drive puis je l’ai transmis au Google Drive de mes élèves. Une fois le sondage devant eux (sur le ipad), mes élèves se déplaçaient et allaient questionner différentes personnes. Ils entraient directement les réponses sur le ipad et celles-ci se compilaient automatiquement. Cette étape a été très enrichissante pour pratiquer les habiletés sociales de mes élèves (surtout pour mon élève dysphasique, mais aussi pour les autres qui sont souvent ostracisés). L’utilisation du ipad soutenait leur confiance et leur autonomie. Elle leur permettait aussi d’être mobiles pour aller questionner les gens. À cette étape, nous avons rencontré une seule difficulté : nous devions constamment nous trouver dans une zone desservie par une borne wi-fi pour enregistrer les réponses au sondage. Les élèves devaient donc inviter les intervenants en classe ou se déplacer puis revenir en classe pour envoyer les réponses. Une fois les réponses compilées dans Google Drive, nous avons pu générer automatiquement les diagrammes circulaires et les diagrammes à bandes (sous forme de résumé des réponses). J’ai donc imprimé ces diagrammes en couleurs et j’ai invité les élèves à formuler des conclusions suite à leur interprétation de ces graphiques. Si nous avions eu plus de temps, j’aurais pu demander aux élèves de faire eux-mêmes le tableau de dépouillement dans le ipad pour ensuite créer les diagrammes circulaires ou à bandes à l’aide du logiciel numbers.

Cette façon de faire a été très aidante pour mes élèves, car elle leur a permis d’être fonctionnels et autonomes malgré leurs difficultés. Par exemple, quand ils essayaient de faire un diagramme à bandes à la main, les lignes étaient croches même avec l’utilisation de la règle (surtout pour mon élève dyspraxique) et tout devenait sale à force de frotter leurs mains sur leur feuille. Lorsque mes élèves utilisaient le ipad pour créer des tableaux de distribution et des diagrammes et qu’ils pouvaient imprimer le tout en couleur, ils étaient vraiment beaucoup plus fiers de présenter leurs travaux.